Quels
sont les textes sur l'obligation d'information du médecin ?
Le principe de l'information préalable est posé
dans les textes suivants :
Quelle est l'étendue de
l'information ? Le médecin doit-il tout dire ?
L'information doit notamment porter sur le diagnostic, la nature
des actes médicaux et les risques encourus.
- Le principe : l'information doit porter sur tous les risques
graves même exceptionnels et même si l'intervention
apparaît médicalement nécessaire. (Cour
de cassation 14/10/97, 17/2/98, 27/5/98 , 7/12/99, 18/7/2000;
CE 5/1/2000)
- Le Conseiller P. Sargos a donné une définition
des risques graves comme " de nature à avoir des
conséquences mortelles, invalidantes ou même
esthétiques graves compte tenu de leurs répercussions
psychologiques ou sociales ". Le Conseil d'Etat dans ses
arrêts du 5 janvier 2000 a été plus précis
: il se réfère au décès et à
l'invalidité.
- Le médecin ne saurait être dispensé
de son obligation d'information par le " seul fait "
que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement
(Cass, 1ère civ, 7/12/99 Neuburger).
Le Conseil d'Etat dans ses arrêts du 5 janvier 2000
vise quant à lui les risques " connus ".
- Un arrêt de la 1re chambre civile de la Cour de cassation
du 18 juillet 2000 a précisé que le médecin
" n'est pas dispensé de cette information sur la
gravité du risque par le seul fait que l'intervention
serait médicalement nécessaire ".
- En mars 2000, l'agence nationale d'accréditation
et d'évaluation en santé a publié à
destination des médecins un ensemble de recommandations
relatives à l'information qui doit être donnée
aux patients. Concernant le contenu de l'information, l'agence
rappelle que l'information doit porter sur l'état de
santé du patient et les soins et qu'elle doit être
actualisée. Il donne ensuite une liste de critères
de qualité de l'information qui doit être hiérarchisée,
reposer sur des données validées et elle doit
présenter les bénéfices attendus avant
les inconvénients.
Ces recommandations sont disponibles sur le site de l'ANAES
- L'obligation d'information est renforcée
en matière de chirurgie esthétique (le chirurgien
doit informer le patient de tous les désagréments
- Cour d'appel de Paris 9 avril 1999 -) , prélèvement
d'organes, recherches biomédicales, auquel cas l'information
doit porter sur tous les risques encourus.
- Les limites à l'obligation d'information :
- L'urgence, l'impossibilité ou le refus du patient
d'être informé :
- Par deux arrêts du 7 octobre 1998, la Cour de
cassation en assemblée plénière a
précisé les cas d'exonération du
médecin : " Hormis les cas d'urgence, d'impossibilité
ou de refus du patient d'être informé, un
médecin est tenu de donner une information loyale,
claire et appropriée sur les risques graves afférents
aux investigations ou soins proposés et il n'est
pas dispensé de cette obligation par le seul fait
que ces risques ne se réalisent qu'exceptionnellement.
"
- Elle a égalemnt jugé qu' un médecin
ne peut pas être tenu responsable du préjudice
subi par une patiente qui avait préféré
être opérée sous anesthésie
locale plutôt que sous anesthésie générale,
dès lors que ce médecin avait informé
la patiente des risques liés à ce mode d'anesthésie.
La cour a précisé que le médecin
"n'est pas tenu de réussir à convaincre
son patient du danger de l'acte médical qu'il demande
" (Cour de cassation, 1re Chambre civile, 18 janvier 2000).
Une fois bien informé, le patient est responsable
de ses choix.
- Dans le même sens, le 5 janvier 2000, le Conseil
d'Etat (GUILBOT/APHP) a également jugé que
l'information n'est pas requise " en cas d'urgence,
d'impossibilité ou de refus du patient d'être
informé. "
- L'intérêt du malade, des raisons légitimes
et un diagnostic ou pronostic grave :
- L'article 35 du code de déontologie médicale
prévoit :
"Le médecin doit à la personne qu'il
examine, qu'il soigne ou qu'il conseille, une information
loyale, claire et appropriée sur son état,
les investigations et les soins qu'il lui propose. Tout
au long de la maladie, il tient compte de la personnalité
du patient dans ses explications et veille à leur
compréhension.
Toutefois, dans l'intérêt du malade
et pour des raisons légitimes que le praticien
apprécie en conscience, un malade peut être
tenu dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic
graves, sauf dans les cas où l'affection dont il
est atteint expose les tiers à un risque de contamination.
Un pronostic fatal ne doit être révélé
qu'avec circonspection, mais les proches doivent en être
prévenus, sauf exception ou si le malade a préalablement
interdit cette révélation ou désigné
les tiers auxquels elle doit être faite. "
- Par un arrêt du 23 mai 2000, la Cour de cassation
a clairement repris le code de déontologie médicale
et a admis qu'un patient peut être tenu dans l'ignorance
en présence de ces trois conditions cumulatives.
|
Quelle est la
forme de l'information ? Faut-il un écrit ?
- L'information doit être "loyale, claire et appropriée
" (Cour de cassation, 14/10/97).
- Elle peut être approximative.
- En principe, la forme est libre : l'information peut
être donnée oralement ou par écrit, sauf en
matière de recherches biomédicales ou de circonstances
exceptionnelles (en cas de surdité, par exemple), cas dans
lesquels l'information doit faire l'objet d'un écrit.
- Par contre, la preuve de l'information est à la charge
du médecin et/ou de l'établissement de soins (Cour
de cassation, 25 février 1997 ; CE, 5/1/2000 GUILBOT/APHP)
La preuve peut être rapportée par tous moyens
(Cour de cassation, 14 octobre 1997)
- On peut donc rapporter la preuve de l'information par :
- un faisceau de présomptions suivant les circonstances
de l'espèce (par exemple décision du Tribunal
de grande instance de Rennes en date du 9 mars 1998 relevant
à propos d'une extraction dentaire " l'avis négatif
" du premier praticien consulté et le renvoi vers un
autre chirurgien-dentiste, ces circonstances permettant de
présumer une information sur les " risques généraux
" de l'intervention)
- bien entendu, un écrit recensant les risques graves
auxquels s'expose le patient et signé par celui-ci.
Suivant les circonstances, il pourrait être laissé
un délai de réflexion au patient, le médecin
restant bien entendu à sa disposition pour des éclaircissements.
En cas de difficulté, les juridictions ont le pouvoir
de contrôler la qualité de l'information donnée.
- le contenu du dossier (qui peut être modifié
a posteriori), ou les témoignages des auxiliaires médicaux
ou ceux d'autres médecins peuvent porter à suspiscion.
- Actuellement, on voit de plus en plus de médecins ou
d'établissements de soins qui délivrent une notice
d'information aux patients, à signer. On peut douter de
l'efficacité d'une telle pratique qui a pour effet néfaste
de dispenser certains praticiens peu consciencieux d'un entretien
particulier sur les risques encourus. En outre, si la notice n'est
pas complète, elle constitue une preuve contre le médecin.
Si elle est trop alarmiste, elle risque de dissuader le patient
de se faire soigner.
- Ainsi, l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation
en santé indique dans ses recommandations relatives à
l'information des patients publiées en mars 2000 qu'en
ce qui concerne la forme de l'information, le principe est la
primauté de l'information orale. L'information écrite
ne doit constituer qu'un complément possible de l'information
orale. C'est écrit n'a pas a être assortie d'une
formule obligeant le patient à le signer. Enfin, l'agence
recommande une évaluation de l'information donnée,
notamment par des enquêtes auprès des patients et
l'analyse rétrospective des dossiers médicaux.
Ces recommandations sont disponibles sur le site de l'ANAES
Quel est le destinataire de l'information (en
cas d'incapacité du patient) ?
- le patient.
- s'il ne peut recevoir l'information, la ou les personnes aptes
à consentir à l'acte médicale. Cliquer ici
pour des précions sur le consentement
du patient.
Peut-on obtenir une indemnisation pour défaut
d'information ?
- Le problème qui se pose pour le patient est celui du
lien de causalité entre la carence informative et le dommage
corporel subi. Il s'agit de savoir si, lorsqu'un accident médical
survient, cet accident est la conséquence du défaut
d'information.
- En général, on considère que le défaut
d'information n'a fait perdre au patient qu'une chance d'éviter
le risque auquel il a été soumis et le dommage qui
en est résulté. Il est certain en effet que le défaut
d'information n'est pas à l'origine du préjudice
corporel.
- La jurisprudence n'est pas encore très claire à
cet égard. Un arrêt de la Cour de cassation du 20
juin 2000 dans l'affaire HEDREUL a précisé que le
patient pour obtenir réparation doit établir
que s'il avait été dûment informé,
il aurait fait un choix différent. La Cour de cassation
précise que pour ce faire, les juges doivent prendre en
considération " l'état de santé du patient
ainsi que son évolution prévisible, sa personnalité,
les raisons pour lesquelles les investigations ou les soins à
risque lui sont proposés, ainsi que les caractéristiques
de ces investigations, de ces soins et de ces risques ".
- On peut ainsi dégager la distinction suivante :
- Si l'acte médical est inéluctable, on peut
penser que, même bien informé, le patient s'y
serait soumis ; dans ce cas, il n'existe aucun dommage réparable,
sauf le préjudice moral subi par le patient qui
découvre a posteriori l'atteinte portée à
son libre choix et à son consentement, et l'incapacité
temporaire de travail non prévue du fait du défaut
d'information. Ce qui ne dispense pas pour autant le médecin
de son obligation d'information (arrêt de la 1re chambre
civile de la Cour de cassation du 18 juillet 2000).
- Par contre, si l'intervention n'a rien d'inéluctable,
le patient est privé, du fait du défaut d' information,
de toute possibilité de choix, et c'est alors l'entier
dommage qu'il faut réparer, en raison de cette privation
totale de tout choix.
- Il faudra attendre sur ce point la jurisprudence à
venir.
- Cette distinction est critiquée dans la mesure où
la plupart du temps il est illusoire d'envisager le refus du patient
et cette appréciation a posteriori serait divinatoire.
C'est pourquoi certains juristes proposent une indemnisation plus
simple sur la base de l'article 16 - 3 alinéa 2 du Code
civil : "Le consentement de l'intéressé doit
être recueilli préalablement hors le cas où
son état rend nécessaire une intervention thérapeutique
à laquelle il n'est pas à même de consentir".
Resterait à déterminer le quantum indemnisable sur
cette base.
|