Qu'est-ce
qu'une infection nosocomiale ?
- Il s'agit d'une infection contractée dans un établissement
de soins, qui n'était ni en incubation ni présente à l'admission
du malade. C'est l'hypothèse difficilement tolérable suivant laquelle
un patient est hospitalisé pour un mal et contracte un autre mal dans l'établissement
de soins.
- La circulaire du 13 octobre 1998 "relative à l'organisation de la
surveillance et de la prévention des infections nosocomiales" définit
l'infection nosocomiale comme :
- toute maladie provoquée par des micro-organismes
- contractée dans un établissement de soins par tout patient
après son admission, soit pour une hospitalisation, soit pour y recevoir
des soins ambulatoires
- que les symptomes apparaîssent lors du séjour à l'hôpital
ou après
- que l'infection soit reconnaissable aux plans clinique et/ou microbiologique
- On tient compte d'un délai de 48 à 72 heures entre l'admission
et le début de l'infection. Ainsi, si l'infection se révèle
moins de 48 heures après l'admission, on en déduit que l'infection
était en incubation au moment de l'admission, et qu'elle n'a donc pas été
contractée dans l'établissement de soins. Pour que l'infection nosocomiale
soit retenue, il faut qu'elle se manifeste au moins 48 heures (parfois jusqu'à
72 heures selon l'infection) après l'admission.
Quels sont les textes pour lutter contre les
infections nosocomiales, et quelles sont les obligations des établissements
de soins ?
-
La "contagion intrahospitalière" est une préoccupation
ancienne qui a abouti aux premiers textes dans les années 1970.
-
Ainsi, le 19 septembre 1972, une résolution de Comité
des ministres du Conseil de l'Europe a invité les Etats à prendre
des mesures adaptées pour l'hygiène hospitalière.
-
2 circulaires françaises des 18 octobre 1973 et 1er septembre
1975 ont mis en place une sorte de "veille nosocomiale" par la création
dans chaque hôpital d'un "comité de lutte contre l'infection nosocomiale"
(CLIN).
-
Le décret du 6 mai 1988 a rendu obligatoire la constitution
de CLIN, mais seulement dans les hôpitaux publics et les établissements
privés participants au service public hospitalier.
-
Puis, par arrêté du 3 août 1992, le ministre
de la santé de l'époque a créé un "comité technique
national des infections nosocomiales" (CTNIN) et 5 centres interrégionaux
(CCLIN). Cet arrêté ne s'est pas non plus appliqué aux établissements
de santé privés.
-
Progressivement, le droit français a posé des obligations
d'hygiène, aseptie et décontamination :
- le décret du 2 octobre 1992 concernant les structures de chirurgie
ambulatoire prévoit la décontamination, le stockage et l'entretien
du matériel nécessaire aux soins et aux transports des patients
(art D 712-31 du Code de santé publique). Ce décret insiste sur
"les conditions d'hygiène et d'aseptie nécessaires"
- l'arrêté du 7 janvier 1993 relatif au secteur opératoire
pour les structures pratiquant l'anesthésie ou la chirurgie ambulatoire
évoque "une hygiène spécifique et adaptée" pour limiter
les risques de nature notamment infectieuse. L'organisation du secteur opératoire
doit être précisé et consigné dans un document écrit
qui définit les procédures et les modalités de nettoyage,
décontamination, désinfection et stérilisation. Ces procédures
sont vérifiées périodiquement "sous la responsabilité
d'un médecin coordinateur, sans préjudice de la responsabilité
de chaque praticien"
- le décret du 6 septembre 1995 dispose que le médecin doit "veiller
à la stérilisation et à la décontamination des dispositifs
médicaux qu'il utilise et à l'élimination des déchets
médicaux selon les procédures réglementaires." Cette obligation
est reportée dans le Code de déontologie médicale.
- l'arrêté du 3 octobre 1995 concerne essentiellement le matériel
d'anesthésie et de réanimation dont l'organisation doit également
être retranscrite dans un document écrit soumis à avis
- le décret du 7 avril 1997 relatif à l'organisation et au fonctionnement
de l'Agence Nationale d'Accréditation et d'Evaluation en Santé prend
en compte "la fréquence et la gravité des accidents iatrogènes
et des infections nosocomiales" (art. R 791-1-2 du Code de la santé publique)
- une circulaire du 20 octobre 1997 précise les modalités de
stérilisation des dispositifs médicaux et fait de l'obtention de
l'état stérile et son maintien une obligation de résultat
- Enfin, la loi n°98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement
de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire
des produits destinés à l'homme oblige les établissements
de santé à organiser en leur sein la lutte contre les infections
nosocomiales.
- Egalement, tout le dispositif concernant la matériovigilance, la pharmacovigilance
et l'hémovigilance participe de la lutte contre les infections nosocomiales.
- Le décret n° 99 - 1034 du 6 décembre 1999 précise
les dispositions relatives à l'organisation de la lutte contre les infections
nosocomiales dans les établissements de santé.
- En définitive, les médecins et les établissements de
soins sont tenus à une obligation d'hygiène et d'asepsie parfaites.
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Sur
quel fondement peut-on agir en justice en cas d'infection nosocomiale ?
-
Vous pouvez agir :
- contre un hôpital public devant une juridiction administrative (tribunal
administratif, Cour administrative d'appel, Conseil d'Etat)
- contre un établissement privé et/ou un médecin devant
une juridiction civile (tribunal de grande instance, Cour d'appel, Cour de cassation)
- contre une personne physique ou morale devant le juge pénal en cas
d'homicide ou de blessure
- Dans tous les cas, il est souvent préférable de procéder
à une expertise médicale pour avoir accès à l'entier
dossier médical et également bénéficier d'un avis
d'expert.
- Devant les juridictions administratives :
- depuis 1988, le Conseil d'Etat présume la faute dans l'organisation
du service public hospitalier en cas d'infection nosocomiale (arrêts Cohen
du 9/12/88, Bazin 9/12/89, Bailly 1/3/89, Maalem 14/6/91...)
- il s'agit d'une présomption simple : l'hôpital peut tenter d'établir
qu'il n'a commis aucune faute dans le fonctionnement du service. Pour ce faire,
il doit justifier de toutes les précautions et diligences déployées
dans le service pour lutter contre les infections ou démontrer que le patient
était porteur du germe lors de son entrée à l'hôpital
(CAA Paris 18 mai 1999 NEVEU).
- la présomption de faute ne s'applique que pour les salles d'opérations
ou d'accouchement
- en dehors de ces lieux, il appartient aux victimes de prouver la faute de
l'hôpital, à savoir que l'établissement n'a pas respecté
son obligation d'asepsie parfaite
- Devant les juridictions civiles :
- avec un peu de retard par rapport aux juridictions administratives, les juridictions
judiciaires ont retenu les mêmes principes
- ainsi, le 21 mai 1996 (arrêt Bonnici) la Cour de cassation a retenu
une présomption de responsabilité en salle d'opération, que
la clinique ne peut écarter qu'en prouvant l'absence de faute de sa part
- dans un arrêt du 16 juin 1998 (Belledone), la Cour de cassation a confirmé
cette présomption de faute et elle a ajouté qu'une salle d'accouchement
devait être assimilée à une salle d'opération
- par 3 arrêts du 29 juin 1999, la Cour de Cassation a jugé
que les établissements de santé privé et les
médecins ont une obligation "de sécurité de
résultat " dont ils ne peuvent se libérer qu'en rapportant
la preuve d'une cause étrangère (CPAM de la Seine
St Denis, Aebi et Follet)
- dès lors, il ne suffit plus aux acteurs médicaux de prouver
qu'ils n'ont pas commis de faute pour être exonérés de leur
responsabilité. Il faut prouver une cause étrangère. On passe
ainsi du régime de la présomption de faute à celui de l'obligation
de sécurité de résultat
- en outre, cet arrêt a étendu la responsabilité aux médecins
(alors qu'auparavant seuls les établissements de santé étaient
tenus pour responsables en matière d'infection nosocomiale)
- ainsi qu'à tous les lieux de l'établissement de santé
(et non plus seulement dans les salles d'accouchement et d'opération
comme auparavant).
- Devant les juridictions pénales, il est possible d'agir pour homicide
involontaire, atteinte à l'intégrité physique d'autrui ou
mise en danger d'autrui selon les cas.
- Quelle que soit la juridiction saisie, si la responsabilité des acteurs
médicaux est reconnue, vous pouvez obtenir des dommages et intérêts
en réparation de votre préjudice.
Erreur de dépistage de séropositivité
et télémédecine (cliquez
ici)
Contamination du sida ou de l'hépatite
C par voie naturelle (cliquez
ici)
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