Exploration du désir sexuel chez quatre femmes dans une perspective féministe
|
||||||
Suite à la présentation des facteurs particuliers associés au désir sexuel de la femme qui ont émergé de la confrontation des éléments théoriques et des données empiriques de notre étude, il nous apparaît important de suggérer certaines applications cliniques. À travers celles-ci, nous tenterons de démontrer comment une intervention féministe améliorait la situation du désir sexuel de la femme. Pour ce faire, nous présenterons les fondements théoriques desquels devrait s'inspirer toute intervention dite féministe. Par la suite, nous expliquerons certaines applications cliniques qui sont en lien avec les résultats de notre étude.
4.1 L'intervention féministe et ses fondements théoriquesDans un exposé portant sur l'intervention féministe, Simard explique qu'une analyse féministe d'une réalité donnée impliquerait une remise en question de la relation d'aide ou de la relation thérapeutique. L'analyse féministe nous forcerait à reconnaître les enjeux de ce type de relation. Ayant comme prémisse que les relations entre les deux sexes seraient essentiellement des rapports de pouvoir des hommes sur les femmes, Simard estime que l'analyse féministe nous amènerait à questionner le rapport de pouvoir retrouvé à l'intérieur même de la relation thérapeutique. Ainsi, l'intervention féministe chercherait à réduire ce rapport de pouvoir en proposant certaines stratégies. Selon Corbeil et al., ces stratégies concerneraient le rôle de l'intervenante dans son rapport avec la cliente et viseraient à mettre l'accent sur l'action et la conscientisation plutôt que sur l'introspection. Afin d'éviter la reproduction de ce rapport de pouvoir à l'intérieur de la relation thérapeutique, il s'avérerait nécessaire d'établir des fondements théoriques aux nouvelles stratégies que proposaient les intervenantes féministes. Ces fondements se retrouveraient derrière toute intervention d'inspiration féministe. Travaillant en maison d'hébergement pour femmes victimes de violence conjugale, l'intervention féministe que nous y pratiquons s'inspire de ces fondements théoriques. Toutefois, afin de les présenter dans le cadre de notre étude, nous avons fait la lecture d'écrits expliquant l'intervention féministe en thérapie. Les quatre fondements théoriques de l'intervention féministe que nous présenterons s'inspirent de notre expérience de travail et des écrits d'auteures telles que Corbeil et al., Simard, Flewharty, Greenspan et Thomas. En les présentant, nous y préciserons brièvement le rôle de la sexologue versus celui de la femme venue consulter. La démystification du pouvoir professionnelAfin de démystifier le pouvoir professionnel, la sexologue aurait à expliquer à la femme la nature et les objectifs de la démarche qu'elle entreprend. Elle éviterait d'utiliser un jargon hermétique afin de rendre accessible à la femme les explications qu'elle lui fournirait. Elle clarifierait les rôles de chacune et identifierait la part que chacune d'elles jouerait dans la résolution du problème. En intervention féministe, la femme qui consulte serait incitée à questionner la pratique de la sexologue afin qu'elle ait le pouvoir d'accepter ou de rejeter la façon de voir de la sexologue. L'implication personnelle de la sexologueEn intervention féministe, la sexologue deviendrait également partie prenante du processus en apportant sa propre expérience. Elle exprimerait des exemples de sexismes tirés de son vécu en tant que femme. Ainsi la femme se sentirait moins inadéquate et cela contribuerait à démystifier le mythe de la "toute puissance" de la sexologue. Elle aurait l'occasion d'avoir une emprise réelle et un pouvoir décisionnel sur la dynamique s'instaurant avec la sexologue. L'utilisation d'un contrat clairL'intervention féministe préconiserait la divulgation des fondements et des objectifs d'intervention d'où la nécessité d'établir un contrat clair avec la cliente. Ainsi, la sexologue identifierait exactement ce sur quoi la femme veut travailler, ses attentes, ce qu'elle voit comme étant un problème, etc.. Elle ferait part de ses limites, à la fois comme femme et comme sexologue. Ce contrat serait réévalué et renégocié au besoin. Le travail de groupePar l'intervention féministe, la sexologue favoriserait l'implication de la femme à l'intérieur d'un groupe de femmes vivant des difficultés semblables et poursuivant un cheminement similaire. Le travail de groupe favoriserait, chez la femme, la prise en charge autonome de sa démarche et une prise de conscience du caractère relatif de sa responsabilité personnelle. Cette implication à l'intérieur d'un groupe redonnerait à la femme un sentiment de solidarité et d'appartenance. Le groupe deviendrait aussi un lieu de choix où la femme apprendrait à se reconnaître en dehors du regard de l'homme. Ce serait aussi une façon de départager le pouvoir car la sexologue ne serait alors plus la seule source de référence. Le travail de groupe constituerait un outil supplémentaire à l'aide individuelle. Ces quatre fondements viseraient à réduire le rapport de force existant à l'intérieur de la relation thérapeutique en redonnant à la femme du pouvoir sur la démarche qu'elle entreprend. Outre ces fondements théoriques, Corbeil et al. précisent aussi que l'intervention féministe aurait comme objectif fondamental de faire prendre conscience aux femmes de leur conditionnement social, des rôles limitatifs auxquels la société les confinerait et des stéréotypes sexuels. Nous verrons que cet objectif fondamental est accompagné d'objectifs secondaires qui seraient tout aussi importants en ce qui a trait à l'intervention féministe. Ces objectifs seraient transposables dans une démarche thérapeutique centrée sur la résolution des difficultés sexuelles vécues par les femmes. |
||||||
|
||||||